Règle maçonnique abrégée à l’usage des Loges Réunies et Rectifiées

arrêtée au convent général de Wilhelmsbad en 1782

Grenoble et Lyon, 1785-1790

Ce texte est extrait du MS Fonds général 5919, pièce 3, de la Bibliothèque Municipale de Lyon. Il date de 1790.

I

Adore l’Etre plein de majesté qui conçut l’univers dans sa pensée, le créa par sa volonté, et le conserve par son action ; prosterne-toi devant le Grand Architecte ; bénis la Providence qui te fit naître parmi les chrétiens, annonce dans toutes tes actions, une moralité éclairée, sans hypocrisie et sans ostentation.

II

Souviens-toi sans cesse que l’homme fut le chef-d’œuvre de la création, puisque Dieu même le créa à son image et à sa ressemblance. Sois pénétré de la nature immortelle de ton âme, et sépare avec soin ce principe céleste et indestructible des alliages étrangers.

III

Ton premier hommage appartient à la Divinité, le second au Souverain qui la représente sur cette terre. Chéris ta patrie, honores-en les chefs ; remplis scrupuleusement toutes les obligations du citoyen et songe qu’elles ont été sanctifiées par les vœux libres du Maçon ; les enfreindre c’est ajouter le parjure à l’ingratitude.

IV

Sorti d’une tige commune, aime en frères tous tes semblables, ils ont comme toi une âme immortelle, les mêmes besoins, les mêmes droits. L’univers est la patrie du Maçon et rien de ce qui regarde l’homme ne lui est étranger. Respecte l’association maçonnique répandue partout et viens offrir avec nous dans nos Temples ton hommage à la Bienfaisance.

V

Dieu pouvant se suffire à lui-même daigna se communiquer aux hommes. Rapproche-toi de ce modèle infini, en versant sur ton prochain toute la masse de bonheur qui est en ton pouvoir. Tout ce que l’esprit humain peut concevoir de bien est soumis à ton action. Qu’une bienfaisance active, éclairée, universelle, soit le principe de ta conduite. Préviens le cri de la misère, n’y sois du moins jamais insensible. Fuis l’avarice et l’ostentation, ne cherche pas la récompense du bien dans les applaudissements de la multitude, mais au fond de ton cœur ; et si tu ne peux seul faire autant d’heureux que tu le voudrais, viens accroître le faisceau sacré de bienfaits que nous formons et coopère selon tout ton pouvoir à nos établissements utiles.

VI

Sois affable et officieux, que ton exemple inspire à tous les cœurs l’amour de la vertu ; partage sincèrement les peines et la joie de ton prochain, et que l’envie ne trouble jamais ces jouissances. Pardonne à ton ennemi, aime-le, fais-lui du bien : remplis ainsi un des préceptes les plus sublimes de la morale sacrée et tu recouvreras les vestiges de ton ancienne grandeur.

VII

Sonde les replis cachés de ton cœur : ton âme est la pierre brute que tu dois dégrossir ; offre à l’Etre suprême l’hommage de tes affections réglées et de tes passions vaincues : que tes mœurs soient pures, ton âme vraie, droite, humble ; évite le scandale ; crains les fruits amers de l’orgueil qui perdit l’homme. Etudie les hiéroglyphes de l’Ordre, ils voilent de grandes vérités et tu deviendras meilleur par cette méditation.

VIII

Tout Maçon, de quelque communion chrétienne, pays ou condition qu’il soit, a un droit spécial sur ton affection. Respecte dans la société les distances légitimes, dans nos Temples nous ne connaissons que celles que présentent le vice et la vertu. Défends-toi de toute distinction profane qui blesserait parmi nous l’égalité et ne rougis jamais dans le monde d’un homme honnête que tu as ici embrassé comme ton frère. Ne fais pas attendre le secours que tu peux donner, cherche à ramener celui qui se trompe ; s’il s’élève un nuage entre des frères, travaille sans délai à le dissiper car la concorde seule peut cimenter nos travaux.

IX

Ne t’écarte jamais des obligations imposées aux Maçons et auxquelles tu as consenti ; respecte tes supérieurs, obéis-leur, ils parlent au nom des lois. Que l’engagement que tu as pris de garder nos secrets soit sans cesse en ta mémoire, si tu osais l’enfreindre ton cœur te le reprocherait à jamais et tous les Maçons t’abandonneraient.